
Ce matin, en voyant l’Ibex 35 ouvrir à -0,63%, j’ai eu un déjà-vu familier : l’Europe qui se met en position fœtale avant chaque décision Fed. Cette baisse préventive de Madrid illustre parfaitement notre dépendance maladive aux humeurs de la banque centrale américaine. 13.271 points d’attente fébrile pour une annonce qui tombera à 20h, heure européenne. Cette soumission des bourses européennes à Washington me dérange autant qu’elle me fascine.
Comment sommes-nous devenus si dépendants des décisions d’une institution située à 6000 kilomètres ?
Pourquoi cette baisse matinale m’agace
L’Ibex qui baisse avant même l’annonce Fed, c’est l’illustration parfaite de notre neurose collective. Les investisseurs madrilènes vendent par anticipation d’une décision qu’ils ne connaissent pas encore. Logique de marché ou prophétie auto-réalisatrice ?
Ma conviction : cette baisse préventive révèle plus la psychologie fragile des marchés européens que la réalité économique espagnole.
L’Europe, vassal monétaire des États-Unis
Depuis quinze ans que j’observe les marchés européens, le même schéma se répète : nous attendons sagement que Papa Powell nous dise comment nous devons nous comporter. L’Ibex, le DAX, le CAC40… Tous suspendus aux lèvres de la Fed comme des adolescents attendant leur argent de poche.
Cette dépendance trahit l’immaturité géopolitique de l’Europe financière. Nous subissons la politique monétaire américaine au lieu de créer la nôtre.
Ce que révèle vraiment cette « attente fébrile »
Les investisseurs européens ne savent plus analyser leurs propres fondamentaux économiques. L’économie espagnole va-t-elle mieux ou moins bien selon que Powell monte ou baisse ses taux de 0,25% ? Ridicule, mais c’est pourtant ce que prix les marchés.
Cette fébrilité révèle une génération de traders formatés aux corrélations automatiques plutôt qu’à l’analyse fondamentale.
Mon expérience des journées « Fed Day »
Chaque annonce Fed, c’est la même comédie dans mon bureau genevois. Clients qui paniquent, collègues qui spéculent, écrans qui clignotent… Tout s’arrête pour écouter religieusement un bureaucrate américain lire un communiqué de trois pages.
L’ironie ? La plupart du temps, ces annonces ne changent rien aux fondamentaux des entreprises européennes que nous analysons.
L’Ibex 35 : baromètre économique ou girouette émotionnelle ?
13.271 points ce matin vs combien ce soir ? Cette volatilité intraday basée sur une annonce extérieure questionne la fonction même des indices boursiers. L’Ibex mesure-t-il la santé de l’économie espagnole ou l’humeur de Jerome Powell ?
Question plus large : les bourses européennes sont-elles devenues de simples amplificateurs des décisions américaines ?
Ce que cette soumission coûte à l’Europe
En calant nos rythmes sur Washington, nous perdons notre autonomie de décision. La BCE suit la Fed avec six mois de retard, les bourses européennes réagissent aux décisions américaines… Résultat : politique monétaire inadaptée aux cycles économiques européens.
Cette vassalisation financière affaiblit structurellement notre souveraineté économique.
L’analyse technique que personne ne fait
-0,63% à l’ouverture pour un indice qui clôturait stable hier. Cette baisse ne correspond à aucun événement économique espagnol ou européen. Pure anticipation psychologique d’une annonce américaine.
Trading technique moderne : acheter ou vendre non pas sur les faits, mais sur l’anticipation de l’anticipation des faits. Meta-spéculation absurde.
Ma prédiction pour ce soir
Quel que soit l’annonce de Powell, l’Ibex rebondira de 0,5 à 1%. Pourquoi ? Parce que l’incertitude aura disparu, remplacée par la « clarté » (même artificielle) de la décision Fed. Les marchés préfèrent une mauvaise nouvelle à pas de nouvelle.
Mécanisme pavlovien : uncertainty down, markets up. Indépendamment de la qualité de la décision.
L’ironie de cette « interconnexion »
Nous célébrons la globalisation financière tout en déplorant ses effets. Cette corrélation forcée entre Madrid et Washington est le prix de l’intégration des marchés mondiaux. On ne peut pas vouloir la liquidité globale sans accepter la volatilité importée.
Dilemme moderne : autonomie ou liquidité ? Il faut choisir.
Ce que cette journée révèle sur nous, investisseurs
Cette attente collective de l’annonce Fed révèle notre infantilisation financière. Plutôt que d’analyser les fondamentaux de Santander, Telefónica ou Inditex, nous attendons qu’un Américain nous dise si ces entreprises valent plus ou moins cher.
Régression intellectuelle d’une profession qui se croit sophistiquée.
Mon conseil aux investisseurs européens
Profitez de cette volatilité artificielle pour acheter les bonnes entreprises espagnoles à prix cassé. Si l’Ibex baisse par pure peur américaine, c’est cadeau pour les investisseurs longs terme focalisés sur les fondamentaux locaux.
Contrarian strategy : quand tout le monde regarde Washington, regardez Madrid.
L’enseignement de cette matinée
Cette baisse préventive de l’Ibex illustre parfaitement la financiarisation excessive de nos économies. Les entreprises espagnoles ne sont pas devenues moins rentables entre hier soir et ce matin. Seule l’humeur des marchés a changé.
Cette soumission européenne aux décisions Fed révèle notre manque de confiance collective dans nos propres fondamentaux économiques. Peut-être est-il temps de grandir financièrement.
